Né à l’époque de la deuxièdeme Intifada, le festival International de poésie Nissan, fruit d’un désir collectif de créer un évènement fort, a bravé les pressions en réalisant ce rêve de réunir des poètes israéliens et arabes, mais aussi ceux du monde entier autour d’un idéal de poésie et de paix ….
Miracle à plus d’un titre, cet évènement annuel dirigé par Naim Araydi année après année, a apporté une dimension à Maghar, ce village druze, musulman et chrétien d’Israël fort de quelques vingt milliers d’âmes, doté ainsi d’une renommée internationale et d’un objectif commun fédérateur...
Le festival propose des débats intenses sur le thème des liens entre poésie et politique avec des avis très contrastés dans cette partie du monde en état de guerre, mais aborde aussi des thèmes essentiels comme la place de la femme dans la culture arabe…
Le festival a pris toute sa dimension symbolique avec la présence permanente d’une délégation jordanienne composée de l’écrivain et chercheur Hanna M. salamah Nu’man et du général retraité Mansur Abu Rashid, militaire du plus haut rang acteur en 1994 des accords de paix entre Israël et la Jordanie, également fondateur du Amman Center for Peace and Development (ACPD).
Bien entendu, la dimension créatrice et artistique occupait une place prépondérante dans ce festival et la présence de poètes israéliens, locaux pour certains ( Amal Kezil poètesse et l’un des organisateurs les plus actifs du festival ) et de poètes-performeurs internationaux provoquait une véritable émulation avec mélanges de genres, de styles, de langues et d’énergies …poétiques .
Autour de « pointures » israéliennes telles Ronny Someck, Amir Oz, Tzippi Shahrour (poète et éditrice du magazine Moznayim) ou encore Tsvika Szternfeld accompagné de sa fille Maayan, talent émergent de la nouvelle génération, gravitait une palette de poètes du monde entier offrant leur textes dans leur langue originale pour la plupart.
Ainsi, selon le brillant poète Russe Yuli Gugolev, lors des lectures (en langue originale), si nous pouvons ressentir cette énergie si particulière, alors nous pourrions sans aucun doute donner notre main à couper : nous sommes bien en présence de la poésie véritable !
…Petite liste non exhaustive de ces poètes internationaux remarqués lors de cette 11éme édition :
-Le polonais Tadeusz Dąbrowski, l’un des symboles de la très haute qualité des poètes polonais contemporains de la jeune génération dont il vient de publier une anthologie,
-Le Turc Mentin Cengis, brillant enseignant, auteur d’une anthologie d’auteurs français et (co-)organisateur de plusieurs festivals en Turquie et dont le séjour comme « prisonnier politique » fut la source d’inspiration ,
-Le Chinois Jidi Majia, organisateur de festival et éditeur à la tête d’une délégation de quatre poètes dont Xu Lu, Ma Qingshan et Hu Wei, et d’une véritable « machine de guerre » de traduction de publication,
-Les Macédoniens Kristina Nikolovska et Slave Dimoski, à la tête d’un important festival international de poésie en Macédonie,
-La Transylvanienne Flavia Cornelia Bochis, accompagnée d’un compatriote roumain et canadien, Alex Cetateanu:.
-Le Japonais Kiwao Nomura et sa femme, dont l’histoire d’amour croise la genèse d’un festival hors norme mélange de leurs passions, danse et de musique ….
Cette même trans-disciplinarité défendue par le poète Amir Oz pour son festival à Tel Aviv fut incarnée lors du festival Nissan par une performance d’ Hugo T. (France), mélange de poésie, de relaxation et de musique live ; performance réalisée avec de nombreux soutiens comme celui de Nadia Etienne pour la traduction et Quelques mécènes lorrains dont le tout premier à soutenir cette démarche, Mr Nasser Amrani) …
L’aspect créateur de rencontres représente l’une des forces de ce festival, bien organisé mais sans rigidité grâce à un esprit « à l’oriental »; il génère la création de liens humains et artistiques, tout en favorisant la connexions entre des jeunes de Maghar et l’univers de la poésie, art vivant palpitant, en mouvement ….
Le festival Nisan de Maghar représente également à plus d’un titre « l’autre Israël », antinomique des choix politiques actuels, celui des hommes de paix, celui de la partie arabe d’Israël, celui de l’accueil et de l’ouverture et celui du dialogue tolérant et ouvert dans une ville mêlant la diversité religieuse …L’esprit d' Isaac Rabin plane peut-être encore sur ces bastions de paix, tels ce festival dont des éditions précédentes réunissaient des colloques de religieux autour de la paix et de la poésie, ou encore sur ces initiatives symboliques comme celles de Daniel Barenboim, l’un des plus grands chef d’orchestre au monde, réunissant dans un rêve de paix un orchestre de jeune musiciens israëlo-arabes : l'Orchestre Divan occidental-oriental.
Une question demeure alors, pourquoi les médias ne se focalisent-ils que sur la violence, les tensions et les drames dans cette partie du monde et quasi-jamais sur les évènements porteurs d’espoirs ?
Retrouvez l’anthologie en langue française de la 11ème Edition du Festival Nissan 2010 en cliquant Ici.
Article et photos par GUS.