13 octobre 2009 2 13 /10 /octobre /2009 21:33

Le silence envahit la salle Poirel noire de monde. Les musiciens prennent place, une jeune femme s’immisce parmi eux. Armée d’une guitare, elle entame le premier morceau. De part et d’autre, deux cuivres. Trombone et flûte lui répondent. Le public, pour la plupart, découvre cette jeune artiste zurichoise de 26 ans. Le mutisme fondra vite pour laisser place à un tonnerre d’applaudissements. Simple et élégante, la musique de Sophie Hunger se révélera tout aussi charmeuse qu’énergique, construisant petit à petit son univers.

 

 

Dans une ambiance feutrée, aux éclairages tout en nuances, la jeune femme sait maîtriser la scène et ses musiciens l’entourent parfaitement. Alternant des chansons en Anglais et en Allemand, la belle murmure quelques remerciements sincères, visiblement émue, dans un français hésitant, presque attendrissant, qui fait sourire la salle entière.

Mais sa voix sait aussi se faire puissante, et c’est bien dans des chansons à l’énergie débordante que le groupe excelle, secouant la salle Poirel jusque dans ses fondations.

Et comme si ses talents de compositeur et de chanteuse ne suffisaient pas, (elle) l’artiste n’hésite pas à devenir pianiste le temps de quelques chansons, maniant la langue de Goethe avec charme et prouesse, la rendant douce et délicate comme personne.

 

 

 

Ses accents de Jazz, sa voix aux sonorités anglo-saxonnes, les trouvailles musicales et les nombreux talents de ses compères font de Sophie Hunger une artiste intemporelle aussi agréable en concert que sur une bonne chaîne hi-fi, au talent immense et à l’univers certain et assumé, comme en témoigne d’ailleurs sa reprise de Noir Désir : le vent nous portera. Rares sont les artistes à pouvoir ainsi s’approprier une chanson sans en dénaturer le propos. Sa voix chaude, rehaussée par le son délicat d’un glockenspiel et de l’accompagnement mélancolique de la guitare ont fini de faire trembler la salle entière, toute dévouée à cette personnalité hors normes !

Chapeau et à bientôt !

 


 


Changement de décor et transformation de la scène en une sorte de gigantesque fouillis pour Brigitte Fontaine. A 70 ans, ce personnage de la chanson française continue de s’entourer de musiciens de talents, dont son homme-orchestre Areski Belkacem.

Quand Brigitte Fontaine entre enfin sur scène, ce n’est pas sans d’étourdissants cris et applaudissements.

Simplement vêtue d’une robe noire, la main gauche prise par une paire de menottes, ses cheveux longs tombent le long de son visage. La voix lancinante, grave, arquée sur ses genoux fatiguées, Brigitte Fontaine traîne avec elle son vécu et ses souffrances, ses coups de gueule et ses chansons. Brigitte Fontaine est vieille et elle nous encule, avec son look de libellule. C’est ainsi, et malgré les années, sa verve et son verbe sont toujours là, intacts. 

 

 

Qu’on aime ou qu’on déteste, Brigitte Fontaine ne laisse en tout cas pas indifférent. Piochant dans un répertoire immense, elle alterne ses chansons des années 1970 avec les titres phares de son dernier album Prohibition. Ainsi, l’on passe d’une version revisitée de je veux du nougat, transformée pour l’occasion en loukoum à Dura Lex, ou le titre éponyme de cet opus Prohibition.

La foule acclame et la sénior sait se faire désirer, disparaissant le temps d’une chanson pour céder la place à son compagnon, chantant et tambourinant sur un tomme basse énorme.





Un jeu intriguant les rassemble sur la chanson suivante, Brigitte Fontaine commentant, espiègle, les paroles romantiques de la chanson d’Areski Belkacem. Ses menottes d’acier troquées pour une paire recouverte de froufrous rouge, et revoilà l’extravagant personnage se trémoussant devant nous, au rythme frénétique des chansons. Yann Péchin, son guitariste, s’applique d’ailleurs à rendre à sa juste valeur l’esprit fou qui anime cette soirée et fait danser ses doigts sur son instrument comme son corps sur scène. 

Le concert s’achève sur la chanson Safi, aux sonorités orientales, repris en chœur par le public, en communion avec tout le groupe, heureux de leur prestation.

 


C’est donc une cohabitation réussie que nous ont offert Sophie Hunger et Brigitte Fontaine, secondées à merveille par des musiciens talentueux et enthousiastes, démontrant, chacune à leur manière, qu’elles possédaient et faisaient évoluer un univers propre, personnel et inimitable.

Inclassables, dans un genre musical qu’il serait impossible de résumer en un mot, leurs chemins se sont croisés sur une paillasse d’alchimistes, sous le regard bienveillant des programmateurs des Nancy Jazz Pulsations…

 

 

 

 

 

crédits photos : Ugo Schimizzi

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