Trois ans après le très mélodieux « The Illusion of Progress », Staind, groupe de rock/métal américain, revient sur le devant de la scène pour présenter son tout dernier opus : « Staind ». Comme à son habitude, le groupe a fait un passage à Paris ce 12 octobre pour prouver à leur public français que, quinze ans après leur premier album, ils sont toujours capable d’envoyer du lourd sur scène…
Cela fait maintenant huit ans que, pour ma part, j’ai découvert Staind. Comme beaucoup d’entre vous, c’est avec les titres Outside et So Far Away (respectivement extraits des albums « Break the Cycle » et « 14 Shades of Grey ») que j’ai eu mes premières expériences avec le groupe. Staind, fondé en 1994 dans le Massachusetts, a eu l’un des parcours les plus atypiques qui soit, musicalement parlant. Ainsi, si leurs deux premiers albums étaient résolument métal, l’arrivée de guitares acoustiques et de ballades sur leur troisième album sonnera le glas, pour beaucoup de fan, de la formation. Après trois albums confirmant cette tendance à s’éloigner de la violence pour venir caresser la douceur, Staind prend, avec son septième album, un tournant décisif dans sa carrière. Se séparant de son batteur, le groupe opère un magnifique retour aux sources et livre un album plus sombre et plus violent que tout ce qu’il a pu produire ces huit dernières années.
Pour fêter l’évènement, c’est hors des frontières de notre région Lorraine que je me suis rendu pour vous, rompant ainsi quelque peu la tradition de Melting-Actu. Car comme à son habitude, Staind ne proposera qu’une seule et unique date française dans sa tournée, le groupe ne faisant pas l’unanimité dans notre pays. C’est à la Cigale, à Paris dans le quartier de Montmartre, que les quatre américains ont choisi d’élire domicile en ce début d’automne.
19h20. Après quelques minutes d’attente, j’entre pour la première fois dans une des salles les plus anciennes et les plus connues de Paris. L’ancien théâtre, aujourd’hui réaménagé complètement en salle de concert, présente toujours quelques attributs de sa vie passée : décoration riche et couleur rouge dominante, balcon typique, plafond décoré et gravures compliquées… Le tout donnant à l’ensemble un charme et une atmosphère que l’on ne trouve, malheureusement, pas dans les grandes salles actuelles. De plus, l’endroit est plutôt petit, offrant une sensation immédiate d’intimité.
À ma grande surprise et malgré mon entrée plutôt tardive dans les lieux, la fosse est quasiment vide. Seuls les trois premiers rangs de spectateurs sont occupés. Pour le reste, les gens sont tous debout autour de la fosse, sur ce que l’on pourrait appeler le premier balcon, ou carrément assis sur les sièges derrière la console de l’ingénieur son. Je descends immédiatement le plancher incliné de la fosse (système ingénieux permettant à tous d’avoir une excellente vue sur la scène) et rejoins le quatrième rang en formation, à un peu moins de deux mètres de la scène. Derrière moi, la salle se remplit tranquillement pendant les trente minutes qui suivent mon installation. À 20h00, les lumières s’éteignent, et la salle, désormais pleine, laisse échapper les éternelles acclamations d’un public qui voit enfin se profiler le moment tant attendu.
April Divine fait son apparition sur la scène de la Cigale. Le groupe de rock suédois, que l’on pourrait situer entre Hoobastank et Muse, envoi immédiatement du lourd et conquiert une bonne partie de l’assistance en seulement deux ou trois morceaux. Une prestation propre et carrée pendant laquelle le frontman n’hésitera pas à s’adresser à l’audience dans la langue de Shakespeare qu’il maîtrise parfaitement. Pris d’une frénésie, semble-t-il incontrôlable, le second guitariste, à gauche sur scène, ne cessera de sauter et de secouer la tête dans tous les sens, faisant voler sa longue chevelure au rythme des morceaux. Idem pour le bassiste qui, de l’autre côté de la scène, agitera ses dreadlocks comme un fou, tout en martelant son instrument. La basse sera le point faible de cette prestation, non pas par la qualité du jeu, mais par les réglages adoptés, rendant quasi inaudible la seconde guitare et ses soli. Mais peu importe, le groupe quittera la scène sous les applaudissements au bout d’une quarantaine de minutes de prestation et reviendra dans le hall à la fin du concert pour discuter avec le public et signer quelques autographes. Une bonne découverte en somme.
Mais il est bientôt 21h00 et la salle commence à s’impatienter. Voilà plus de cinq minutes que rien ne se passe sur scène et le public a hâte de voir enfin débarquer Aaron Lewis et sa bande. S’il est une chose à savoir sur la Cigale, c’est que la ponctualité y est de rigueur. Ainsi, Staind ne montera sur scène qu’à 21h00 précise, pas une minute avant, pas une minute après. L’obscurité tombe à nouveau. Les hurlements sont assourdissants. Aaron s’avance avec sa guitare jusqu’au micro et c’est parti.
Il est inutile d’entrer dans les détails de la setlist qui était, selon moi, parfaite. Un savant mélange entre l’ancien et le nouveau, particulièrement axée sur les morceaux métal, mais ne négligeant pas pour autant les ballades. De plus, le groupe n’a pas succombé à la facilité de faire un « quart d’heure tranquillité » en envoyant toutes les chansons « calmes » les unes après les autres. En effet celles-ci arrivaient plutôt au moment où l’on s’y attendait le moins, permettant aux fans de reprendre leur souffle avant de recommencer à s’agiter.
La prestation est impeccable. Mike Mushok s’agite comme un fou avec sa guitare tandis que Johnny April, plus calme, reste bien concentré sur sa basse, sans oublier d’adresser quelques signes à la foule devant lui. Le batteur restera dans l’ombre, plutôt discret, faisant son travail correctement, mais n’étant pas réellement considéré comme un membre du groupe en raison de son statut temporaire.
Plutôt distant et apparemment perturbé par un élément extérieur, Aaron Lewis, chanteur et guitariste du groupe, se détendra et se montrera même souriant à partir du cinquième morceau. Il limitera ses interventions parlées à des annonces de titres de chansons à peine articulées et se focalisera plus sur la qualité de son chant et de son jeu de guitare. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que Monsieur Lewis sait ce qu’il fait. L’une des plus belles voix de la scène rock actuelle se laissera aller à prolonger des notes à la limite de l’humain, s’attirant ainsi les acclamations d’une foule depuis bien longtemps conquise par l’organe de l’artiste. Il demandera au public de l’accompagner sur So Far Away, morceau phare du groupe, et se laissera surprendre lorsque, spontanément, l’assemblée reprendra seule et en chœur le dernier refrain de Outside, magnifique ballade du groupe. Un moment fort en émotion pour Lewis qui ne pourra dissimuler un léger tremblement de voix en annonçant au public qu’il les remerciait d’être toujours présent après autant de temps.
Le concert s’achèvera après une (trop courte) heure et demi avec un Aaron Lewis devenu plus bavard et souriant, interprétant, en duo avec Mushok, le dernier morceau de leur nouvel album, Something to Remind You. Accompagné tout le long du titre par le public, profitant d’une dernière occasion de chanter avec le groupe, Staind quittera définitivement la scène à 22h30, laissant les lumières se rallumer sur ce qui fut, à n’en pas douter, l’un des meilleurs concerts auquel beaucoup d’entre nous ont pu assister.
Article : Dom Panetta